« La danse appartient au silence de l’esprit »

Ruth Saint-Denis

 

Le mouvement des profondeurs

Mary Whitehouse est l’initiatrice, sur la Côte Ouest des États-Unis, de la découverte de soi à travers le mouvement.

Ses études intensives de danse moderne avec Mary Wigman à Dresde en Allemagne ont profondément influencé son approche thérapeutique, mettant l’accent sur la créativité de la personne en mouvement.

Danseuse accomplie et professeur de danse moderne, elle se tourne vers les concepts de la psychologie des profondeurs, enseignés à l’Institut de psychanalyse jungienne de Zurich, pour développer sa technique de travail.

Elle enseigne à ses étudiants à se mettre en mouvement à partir d’une impulsion spécifique – qui retient la qualité d’une sensation corporelle – pour trouver dans l’inconscient ce qui met la personne en mouvement.

Les premiers travaux de Mary Whitehouse datent des années cinquante et sont publiés sous le titre Le mouvement des profondeurs.

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Le mouvement authentique

L’expression mouvement authentique est utilisée pour la première fois par John Martin en 1933 pour décrire la danse de Mary Wigman.

Pour Whitehouse le terme mouvement authentique implique un facteur émotionnel qui accompagne le mouvement de la personne, contrairement à un mouvement qui échoue à exprimer les émotions ou pensées implicites qui poussent la personne à l’expression.

L’adaptation de la technique d’improvisation de Mary Wigman, associée au processus d’imagination active de Jung, a produit un outil de travail thérapeutique qui intègre le mouvement à la perception des émotions.

Janet Adler, élève de Whitehouse, ajoutera dans les années 70 au concept de mouvement authentique le témoignage comme outil thérapeutique.

 

L’usage thérapeutique

Pendant la phase de mouvement authentique, le thérapeute intervient très rarement, il n’impose ni ne dirige le point de commencement (le démarrage) afin que le patient puisse observer et reconnaître sa propre motivation.

Cette technique invite la personne à bouger, d’habitude les yeux fermés et à plonger dans l’expérience tout en se laissant diriger par les sensations et les images que le corps révèle.

Cette écoute particulière permet l’ouverture du canal entre les sensations intérieures et l’action corporelle, celle-ci se trouvant à l’origine du mouvement authentique.

Selon l’approche de Mary Whitehouse, il y a une différence essentielle entre le mouvement dont l’origine est le « moi » et celui qui émerge de l’inconscient. Autrement dit : entre bouger et être bougé.

Dans cette forme de travail particulière, nous cherchons à ce que le patient devienne conscient de la différence entre ces deux forces opérant en lui.

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Le rôle du témoin

La contribution de Janet Adler à cette technique de travail est d’y avoir rajouté le rôle du témoin.

L’expérience se déroule en paires ou en cercle, le groupe se divise en deux, la moitié est dans le mouvement tandis que les autres sont témoins.

Cette approche se base sur la compréhension que le témoin cherche à voir avec la même intensité que le danseur cherche à être vu.

Après l’exercice a lieu le partage, d’abord de la personne qui était en mouvement, puis du témoin.

Le témoigne n’est pas une interprétation, mais une écoute à travers le corps, un vécu de soi que le mouvement de l’autre nous a permis.

Ainsi se construit une empathie corporelle, une capacité à ressentir le mouvement d’autrui à travers les émotions, les images, et les sensations que le témoignage nous a permis de vivre.

Le témoignage est un défi qui appelle à renoncer à la critique, au jugement et aux pensées pour rester dans le présent, connecté à ce qui émerge de l’intérieur de nous.

 

Lecture:

JANET, Adler, « Who is the witness ? », in Contact Quarterly danse and improvisation journal, Winter 1987.

WALLOCK, Susan Frieder, « An Interview with M.S. Whitehouse », in American Journal of Dance Therapy, vol 4, 1977, p. 45-57.

WHITEHOUSE, Mary Starks, ADLER, Janet, CHODOROW, Joan, Authentic movement, Ed., P.Pallaro, London, 1999.